[FB] Quand tout va mal on ne peut compter que sur sa famille || ELEANOR&EZRA

Ezra ne comprenait rien à ce qui lui arrivait. Ça faisait quoi ? Trois jours ? Quatre jours ? Il avait complètement perdu la notion du temps. Il ne savait même pas combien de temps il était resté au poste de police. On était venu l’arrêter pendant un petit-déjeuner familiale et on lui avait passé les menottes en l’accusant d’agression sexuelle… Immédiatement, Eleanor s’était énervée à un point où Ezra avait été persuadé qu’elle se ferait embarquer également. Heureusement pour tout le monde, il avait été le seul ce jour-là à se retrouver au poste. On l’avait enfermé dans une salle d’interrogatoire où il avait attendu pendant des heures. Ensuite, deux policiers l’avaient rejoint et il avait passé les pires heures de sa vie. On lui avait posé des tonnes de questions, on avait essayé de le faire craquer et de lui faire admettre qu’il avait commis ce dont on l’accusait. Finalement, son avocat l’avait rejoint. Il avait probablement été appelé par Amelia ou par l’une de ses filles… Ezra n’y avait même pas pensé. Il avait du mal à réfléchir correctement depuis qu’on lui avait passé les menottes. Il était rentré chez lui après avoir payé une caution énorme et avoir signé une promesse de comparaitre. Et depuis, il était complètement perdu. Il n’avait rien avalé, il n’avait pas dormi et il faisait les 100 pas dans la maison. Son avocat était venu le voir, il lui avait posé des tonnes de questions, mais le brun était trop sous le choc pour répondre à quoi que ce soit. Il n’avait pratiquement pas parlé depuis. Il semblait dans un autre monde, il semblait perdu et il l’était complètement. Lui ? Accusé d’agression sexuelle ? Comment ça pouvait être possible ? Il avait une seule femme dans sa vie depuis toujours et jamais ça n’allait changer. Il n’avait jamais ressenti le besoin d’aller voir ailleurs en 30 ans. Il était comblé. Et violer des femmes ? Mon dieu, jamais il n’aurait pu faire ça. Cette simple pensée lui donnait envie de vomir. Ezra était debout en plein milieu de la cuisine et il ne réagit pas en entendant sa dame de maison annoncer l’arrivée d’Eleanor. En fait, il ne l’avait même pas entendu. Il était encore sous le choc et il avait peu conscience de ce qui se passait autour de lui. Une nouvelle voix s’éleva derrière lui, mais il ne réagit pas. Une fois de plus, il ne l’avait pas entendu. Il était complètement dans sa bulle.

Il y avait certaines émotions qu’Ezra refoulait complètement au fond de lui. Comme par exemple, la colère. Il était très rare de voir le producteur s’énerver et monter le ton. Il était d’un naturel calme sauf quand la nervosité prenait le dessus. C’était bien la seule émotion qu’il n’arrivait pas à gérer et qui lui provoquait des énormes crises d’angoisse. Étrangement, il n’en avait pas encore faite. Il n’était pas encore angoissé, il ne réalisait pas exactement ce qui se passait. Dans l’optique de se protéger, il s’était enfermer dans une sorte de bulle et il ne parlait plus. C’était encore trop récent pour lui, il n’arrivait pas à réaliser et surtout, il n’arrivait pas à voir tout ce que ce scandale allait impliquer. Depuis son retour, l’ambiance à la maison était très lourde. Ses employés de maison le regardaient étrangement dès qu’il passait, il entendait murmurer sur son passage et il sentait qu’il allait recevoir quelques lettres de démission dans les prochains jours. Sauf Juliette. Juliette était sa plus fidèle employée et elle n’avait pas changé de comportement avec lui. Toujours dans l’optique de se protéger, Ezra avait complètement éteint son téléphone portable. Il ne voulait parler à personne.

C’était sans compter sur le fait qu’il avait des enfants têtus, en particulier Eleanor. L’homme sursauta légèrement lorsqu’il sentit qu’on lui touchait le bras. Il tourna légèrement la tête et il fixa de longues secondes sa fille qui avait posé sa tête sur son bras. Ezra cligna plusieurs fois des yeux et il finit par se décaler légèrement. On aurait pu croire qu’il allait partir, qu’il refusait le contact, mais il se déplaça plutôt pour prendre sa fille dans ses bras. Il en avait besoin. Il ne savait pas exactement ce qu’on disait sur lui dehors et dans la presse, Eleanor avait dû entendre des choses horribles et pourtant, elle était là. Le brun ne dit rien. Il n’y arrivait pas, il avait la gorge serrée. Il serrait fermement son enfant contre lui et au bout de quelques secondes, il craqua. C’était extrêmement rare devant ses enfants, mais là, il n’en avait besoin. Le producteur se mit à pleurer. Un enfer se préparait, il le sentait. Il ne savait pas comment il allait faire pour surmonter cette crise. C’était pire que tout. Même si Eleanor affirmait que ça allait aller, Ezra n’en était pas aussi certain. Son avocat n’avait pas eu de bonnes nouvelles pour lui. Il lui avait déjà parlé de plusieurs dizaines d’années de prison. Lui ? En prison ? Il allait se faire tuer. Il n’avait pas du tout la force de caractère pour finir sa vie en prison. Mon dieu… L’enfer…

Ezra n’arrivait pas à rester en place depuis qu’il était rentré. Il faisait les 100 pas constamment dans la Villa. On le retrouvait à toutes les fois dans une pièce différente. Et la villa était tellement grande que certaines fois, il était difficile à trouver. Quelques fois, il avait essayé de s’asseoir, mais il ne tenait pas. À chaque soir, il accompagnait sa femme au lit et dès qu’il la savait endormi, il quittait la chambre pour continuer son exploration de la demeure. Il se passait des tonnes de choses dans son cerveau et ce n’était pas toujours joyeux. Le producteur se torturait en imaginant le pire, mais il n’avait toujours pas craqué. Il ne réalisait pas encore tout. Il s’était complètement fermé à son avocat lors de sa dernière visite et Ezra allait encore avoir besoin de quelques jours avant de réellement réussir à lui être d’une aide quelconque. Ils allaient devoir trouver une faille dans ce dossier en examinant les preuves de la défense, mais ça, le brun avait du mal à voir comment ça serait possible. Si la police avait procédé à l’arrestation d’un homme de sa notoriété c’est que les preuves avaient déjà été examinées. Habituellement, les autorités étaient très prudentes avec les affaires de cette envergure. Les fausses déclarations fusaient dans le monde du cinéma. Surtout depuis le mouvement #meToo. Certes, il y avait des vraies déclarations, mais certaines femmes ou hommes inventaient des histoires pour détruire quelqu’un… Mais pourquoi lui ? Il n’avait jamais rien fait à personne. Au contraire, il avait donné des carrières extraordinaires à énormément d’acteurs et d’actrices. Sur les plateaux, il pouvait se montrer exigeant en cherchant la perfection, mais il n’était pas méchant. Contrairement à d’autres, il n’avait jamais insulté ou rabaissé l’un de ses acteurs ou actrices. Ce n’était pas de cette manière qu’il travaillait.

À l’heure actuelle, Ezra n’avait plus rien de l’homme qu’il était. Il n’avait plus rien de la prestance et de ce charisme qu’il dégageait presque quotidiennement. Il était seulement un homme perdu qui s’était pris des tonnes de gifle en plein visage et qui était encore sonné des coups. Tellement sonné qu’il finit par en pleurer dans les bras de son enfant. Un père ne devrait pas pleurer dans les bras de ses enfants, ça devrait être le contraire, mais il n’en pouvait plus… Il se retenait depuis trop longtemps, il avait besoin d’évacuer un peu de pression. Et le fait d’avoir Eleanor à ses côtés l’avait soulagé. Elle ne lui avait pas tourné le dos… « Ok… » souffla-t-il. C’était l’un des premiers mots qu’il prononçait depuis l’annonce, mais il était prêt à lui faire confiance. À croire qu’il avait peut-être une chance, aussi maigre soit-elle. Le producteur finit par se détacher d’Eleanor et lui tourna le dos pour qu’elle ne puisse pas voir son visage rougit par les larmes. « J’ai rien fait… Tu le sais hen ? »

La douleur était bien présente chez Ezra. Il savait que tout allait s’effondrer autour de lui. Il ne savait pas encore jusqu’à quel point, mais il allait tout perdre. Sa vie était gâchée. Du moins, sa vie professionnelle venait de se terminer. Il allait perdre la confiance de tous jusqu’à se retrouver complètement seul. Il allait devoir arrêter ses productions et même penser à vendre son entreprise. Mais ça… Personne ne le savait pas encore. Personne ne savait à quel point Ezra était en train de se torturer. Il n’était pas coupable, ceux qui le connaissaient ne pouvaient pas en douter. Du moins, c’est ce qu’Ezra aurait pensé, mais même ses employés de maison avaient commencé à douter de lui. Il ne savait pas ce qu’on disait sur lui dans les médias, mais on devait le rabaisser à un tel point… Le producteur n’était pas encore sorti de chez lui et honnêtement, ça lui faisait peur. Il savait que certaines personnes pouvaient se montrer extrême et il avait peur de ce qu’il pourrait lui arriver.

Le père Meyers avait besoin de se faire rassurer. Si Eleanor était présente, c’est qu’elle le savait non-coupable… Du moins, il l’espérait. Elle ne semblait pas être présente pour lui reprocher un comportement qu’il n’avait pas eu. Sauf qu’Ezra n’avait pas l’habitude de montrer sa colère ou sa tristesse qu’il préféra tourner le dos à sa fille, mais cette dernière ne le laissait pas faire. Bien vite, elle se mit devant lui et l’homme ferma doucement les yeux en sentant les doigts de sa fille lui retirer les larmes qui perlaient sur son visage. « Je le sais bien.. C’est plus fort que moi. » C’était très nul comme excuse, mais il n’en avait pas d’autres. Il n’aimait pas se faire voir dans cet état. C’était difficile pour lui. Le brun cligna plusieurs fois des yeux à la remarque suivante de sa famille. Agir comme un homme innocent ? Il n’agissait pas comme un coupable, seulement comme un homme complètement perdu et dépassé par les événements. « Je dois faire ça comment ? Je suis accusé de viol Eleanor. Tu réalises ce que ça implique ? Même si je suis innocenté, c’est fini pour moi. » Il déglutit. C’était la première fois qu’il en parlait à voix haute et il sentit sa gorge se serrer. « Je ne connais même pas ces femmes. Et pourtant toutes les preuves sont contre moi. Les flics sont sûrs de leur coup. » La nervosité le gagna. La manière dont les policiers s’étaient adressés à lui n’avait rien de rassurant. On le considérait déjà comme un monstre et c’était la même chose sur chacun de ses réseaux sociaux. « On me lance déjà la pierre. Partout. » murmura-t-il en haussant les épaules. Pour tout le monde, il était déjà coupable et il allait finir sa vie derrière les barreaux.

Ezra soupira doucement. Il était complètement désespéré par la situation qui l’empêchait de voir les bons côtés. Certes, il avait toujours sa femme et deux ses filles à ses côtés. Mais il n’avait eu aucune nouvelle de Lucy ce qui l’affectait énormément. « Et par chance que vous êtes là sinon… » Le producteur n’était pas du genre à être extrêmement pessimiste, mais tout seul, il ne pourrait clairement pas affronter tout ça. Au fond, il était reconnaissant de la présence des femmes de sa vie à ses côtés. Un nouveau soupir s’échappa de ses lèvres. « C’est une entreprise familiale. Les producteurs Meyers existent depuis trois générations… Fermer ou vendre serait salir les mémoires de mon père et mon grand-père. Ce n’est pas ce que je veux. Tu sais… Depuis que je suis né, je suis conditionné à reprendre les productions. Ce n’est même pas un choix que j’ai eu. Alors que les enfants autour de moi jouaient, moi, j’apprenais l’histoire du cinéma. Je n’ai jamais rien connu d’autre que ça. » C’était rare qu’Ezra s’ouvre autant, surtout sur son passé. Peu de gens connaissaient l’enfance malheureuse du jeune Ezra qui avait été élevé sur les plateaux de tournage au point de n’avoir jamais pris place dans une salle de classe. Le père Meyers ne savait pas pourquoi il racontait tout ça à sa plus vieille. Peut-être pour lui faire comprendre à quel point les productions Meyers étaient importantes pour lui. S’il fermait, il allait prendre sa retraite. Pas question d’ouvrir autre chose. Il aurait échoué sa vie professionnelle. Il pourrait au moins se rabattre sur sa vie personnelle. « Je suis innocent. Jamais je n’aurais pu faire ça à personne. Mon dieu… C’est horrible. » Négativement il secoua la tête. Ce n’était même pas envisageable. La simple idée le rendait malade. Par la suite, Eleanor se lança dans un monologue pour bien lui faire comprendre qu’il ne prenait pas la meilleure décision en restant enfermer. Sauf que ça faisait que trois jours, il avait besoin de temps avant de reprendre sa vie comme si de rien. C’était trop tôt pour lui, mais également pour tout le monde. « J’ai peur de sortir, Eleanor… Est-ce que tu veux voir mes réseaux sociaux ? Je reçois des menaces de mort sans arrêt. Les gens sont fous et tu sais comme moi à quel point ils peuvent aller loin. Je dois me couper de tout pour mon propre bien, tu comprends ? Mon but n’est pas d’agir comme un coupable ma chérie, mais c’est de protéger le peu de choses qui me reste. Dont ta mère et toi. » Il pinça les lèvres avant de se passer les mains au visage. « Et si le mieux pour vous est de vous éloigner de moi, je le comprends très bien. » Ce n’était pas facile à dire, mais il le pensait réellement. Il sentait que Lucy allait se détacher complètement de lui et il ne pouvait pas lui en vouloir.

Ezra n’avait rien connu d’autre que son travail. Certes, il avait une famille merveilleuse qu’Ezra ne pourrait jamais laisser tomber et il se comptait extrêmement chanceux de les avoir près de lui malgré les difficultés. Néanmoins, Ezra ne pouvait pas s’empêcher de penser à son entreprise qui était également une très grosse partie de sa vie. « J’y ai pensé. Sauf que mon avocat a peur que ça ne soit pas suffisant pour sauver l’entreprise étant donné que ta mère est associée à moi. Et ta sœur aussi. Il me suggère de vendre pour dissocier complètement le nom Meyers des Productions, mais… Je ne peux pas faire ça. Je ne veux pas faire ça. Je viens bien trouver une solution. » Il soupira. Il était encore beaucoup trop tôt pour parler de vente. Ça faisait uniquement quelques jours que le scandale était tombé. Toutes les choses allaient trop vite. Ezra allait devoir prendre le temps d’évaluer toutes ses options, mais pas maintenant. Ezra n’avait pas les pensées claires pour le moment. Tout était trop tôt pour lui. « Je vais trouver une solution… » répéta-t-il dans un murmure. Il essayait de se convaincre lui-même. Il avait un peu de mal à y croire. Ça ne sera pas facile, il le savait, mais tout n’était pas encore terminé.  

Ezra avait peur pour sa famille. Il ne serait pas le seul affecté par ce scandale. Tout le monde allait être touché. La carrière d’Amelia pourrait en subir un lourd coup. Celle de Lucy également et cette dernière l’avait compris assez rapidement. Négativement, l’homme secoua la tête. « Tu ne dois pas en vouloir à Lucy. Elle désire seulement protéger sa carrière, c’est normal. Elle se bat s’y fort pour se faire une place dans le milieu, c’est normal qu’elle s’éloigne de ceux qui désirent lui mettre des bâtons dans les roues. » Ça faisait mal, mais le brun ne lui en voulait même pas. Il voulait seulement que tout le monde aille bien. « Et je ne désire pas m’éloigner de vous, mais je suis conscient que pour vous protéger ça peut être une option. Ça sera peut-être à vous de vous dissocier de moi. Cette histoire va vous faire du mal également. » Ça le tuait que ses proches soient mêlés à ça. Il aurait tellement voulu que ça soit que lui. « Oui, j’en suis conscient. Je vais devoir faire une apparition publique… Mais il est trop tôt. Les gens me voient actuellement comme le grand méchant de l’histoire. Je dois laisser le temps à la pression de redescendre et ensuite, je vais m’adresser à eux… Tant qu’à sortir dans la rue… Non. » Il soupira bruyamment. Il avait déjà eu plusieurs menaces et il craignait vraiment que certains fassent ce qu’ils ont dit. Ezra n’avait pas la force de se battre physiquement contre un groupe. Sans dire qu’il était frêle, il n’était pas violent du tout.